Galerie : une virée à Gorée en 10 escales

Article : Galerie : une virée à Gorée en 10 escales
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18 septembre 2013

Galerie : une virée à Gorée en 10 escales

L’Île de Gorée est l’un des repères historiques les plus importants de l’histoire de la traite négrière qui a eu lieu pendant trois siècles. Un carrefour si important qu’il a reçu la visite de millions de personnes de diverses nationalités, y compris de nombreuses personnalités telles que Nelson Mandela, le pape Jean-Paul II, tout récemment le président Obama, mais aussi ne l’oublions pas de quelque cinquante mondoblogueurs venus en « pèlerinage » sur le lieu qui fut jadis le point de non-retour des ancêtres des Afro-Américains.

Oui, tels des pèlerins, les mondoblogueurs étaient rassemblés cette matinée du 07 avril, écoutant d’un air grave le récit de celui qui nous conta avec passion et émotion, l’histoire tragique des esclaves africains et de l’Afrique dans son ensemble.

      1. Gorée et le Coumba Castel

Chaloupe
La chaloupe « Coumba Castel ».                                                 NathyK ©

Aujourd’hui, je vous propose de naviguer à travers des cartes postales, à la découverte de Gorée. Une autre Gorée, plus gaie et plus lumineuse. Pour raconter l’histoire de cette île, il faut plus qu’un livre, plus qu’un film. Nous allons commencer par dire que Gorée vient de la contraction des mots « Goede Rede », nom donné par les Néerlandais. L’île fut précédemment appelée « Beer » par les autochtones. Les esprits ou « Djinns » faisant partie intégrante de la tradition sénégalaise, le génie qui protègerait l’Île de Gorée se nomme « Coumba Castel », du même nom que notre chaloupe.

Notre seconde visite à Gorée, en août dernier, commença par le départ du port autonome de Dakar. Je décidai d’aller me percher près de la cabine de pilotage, conduite par les officiers de la marine sénégalaise. Je pus admirer la vue magnifique sur la mer, les cargos chargés de marchandises et bien sûr profiter de la douce brise qui nous faisait oublier le temps d’un moment la chaleur lancinante de Dakar. Nous ne prîmes pas plus de quinze minutes pour apercevoir les bâtisses colorées de Gorée.

      2. Gorée et ses guides

Le bord
Gorée, au bord de la mer.                                                             NathyK ©

Sur la chaloupe, je fis connaissance avec un Baye-Fall – membre d’un groupe religieux du Sénégal, reconnaissable, au look particulier dont les dreadlocks – qui me proposa son aide puisque j’avais du mal à me prendre en photo. À la descente, nous fîmes chemin ensemble et c’est ainsi qu’il devint notre guide. Ibrahima nous expliqua qu’il n’était pas un guide touristique officiellement reconnu. Mais sans blague, qu’il était chevronné ! Non, seulement il était gentil et disponible mais en plus il racontait l’histoire de l’île avec une précision exceptionnelle. Je fus définitivement marquée par la capacité de sa mémoire et sa facilité à s’exprimer.

Presque tous les guides étaient des Baye-Fall. Ils vivaient aussi de la vente de leurs œuvres d’art (tableaux, vêtements traditionnels, bijoux…). Habitués au contact avec l’étranger, plusieurs d’entre eux étaient polyglottes. Adeptes du mouridisme, on retrouvait ici et là des représentations de Serigne Touba Mbacké, comme dans la plupart des ruelles de Dakar. Contrairement à la venue de l’ex-président Bush où ils étaient enfermés dans des pièces hermétiques, lors de la visite de Barack Obama, ils avaient relativement eu le droit de circuler, à en croire les dires d’Ibrahima.

      3. Gorée et son art

Art plastique
Tableaux suspendus entre les baobabs.                           NathyK ©

Nous marchâmes droit vers le Fort Castel. Ce fut difficile de résister à l’appel des marchands près du marché Castel, surtout qu’il y avait une dame qui nous avait repérés durant la traversée, mais les poches vides nous ne pouvions que contempler de loin les bijoux. Les Sénégalais, tout comme les Malgaches, sont des artistes dans l’âme. L’art plastique sénégalais est d’habitude très coloré. Les couleurs vives représentent souvent la terre, la nature, le ciel, l’Afrique ou encore les femmes et leurs enfants. Je le trouve vivant, riche et très expressif comme l’Afrique.

      4. Gorée et le Fort Castel

Fort Castel
Le Fort Castel.                                                                                      NathyK ©

Gorée fut un emplacement stratégique, très discuté entre les colonies. Plusieurs colonies prirent successivement les rênes de cet endroit, des Portugais aux Français. C’est ainsi que le « Fort Castel » (castle en anglais) fut aussi baptisé du nom de « Saint-Michel » par les Français. En effet, cette île est le point de l’Afrique le plus proche des Amériques. Il était donc plus facile et plus rapide d’y acheminer de la main-d’oeuvre de l’intérieur du continent vers Gorée et de Gorée vers les Amériques. Mais ce n’était pas le seul « marché d’esclaves », puisque au Cameroun à Bimbia, le même scénario dramatique avait eu lieu.

      5. Gorée et son canon

Canon
Sur le canon.                                                                                          NathyK ©

Nous escaladâmes le canon proéminent, vieux et rouillé. Depuis le départ des derniers colons, des dispositions avaient été prises pour qu’il soit hors d’état de nuire. Il avait été partiellement détruit, notamment au niveau de ses extrémités. Si toutefois, une balle était introduite à travers le canon, elle s’arrêterait bien avant d’être expulsée et exploserait surplace.

De ce lieu, les occupants pouvaient aisément avoir le contrôle de Dakar et se protéger de toute invasion. Ce canon n’aura servi qu’une seule fois, à faire couler un navire dont l’épave engloutie non loin de l’embarcadère est contournée par les bateaux qui accostent à Gorée. Aujourd’hui, le gros canon est détourné de Dakar et les souterrains communicants du Fort Castel servent désormais de lieux d’habitations aux Baye-Fall et aux Goréens.

      6. Gorée et sa flore

Plante
Plante médicinale.                                                                              NathyK ©

J’appris également que l’île est riche de par sa flore, à l’instar de cette plante ci-dessus, qui est très utilisée chez les femmes parturientes. Elle aurait des vertus qui faciliteraient l’accouchement, sans douleur. Elle est également utile pour protéger le nouveau-né contre les mauvais djinns.

En plus des constructions qui rappellent la vieille France et de l’omniprésence de l’art, la troisième similitude que je trouve entre Gorée et l’Île rouge (Madagascar), c’est la présence des baobabs. Les jeunes pousses sont vendues aux visiteurs et les fruits que ces arbres majestueux produisent sont nourrissants et rafraîchissants. Demandez à goûter au jus de bouye à votre prochaine visite au Sénégal.

      7. Gorée et sa beauté exotique

Panorama
Vue panoramique.                                                                               NathyK ©

Gorée est avant tout une île, pas très grande certes, mais qui réclame son côté exotique. C’est une destination reposante, charmeuse, qui laisse le visiteur rêveur aller et venir dans ses pensées. L’eau froide de l’Atlantique rafraîchit aussi bien la peau que l’esprit. Les restaurants qui bordent la côte offrent des délicieux plats de riz aux fruits de mer, une joie explosive pour le palais.

On peut apercevoir de ses bords, la presqu’île de Dakar avec son centre-ville « le Plateau », le palais présidentiel et les autres édifices. Chaque année se tient un concours de natation dont les participants nagent de Gorée vers Dakar.

      8. Gorée et ses monuments

Mémorial Castel
Mémorial de Gorée du Castel.                                                   NathyK ©

Au fur et à mesure que nous avancions, notre guide s’attelait à nous raconter l’histoire de chaque coin de terre. L’une d’elles était celle du Mémorial de Gorée du Castel qui a été inauguré le 31 décembre 1999 par l’ancien président du Sénégal, S.E. Abdou Diouf. Ce monument a été dédié à l’Afrique et à sa diaspora.

Près de ce bâtiment, nous avons eu le plaisir de visiter un artiste qui, avec les différents types de sol (terres rouges, volcaniques, sableuses…) et de la sève de baobab, fait de très beaux tableaux à la commande, si jamais vous passez par là.

      9. Gorée et ses sites historiques

Centre médico-social
Centre médico-social de l’Ile de Gorée.                             NathyK ©

L’Île de Gorée n’est pas une place historique seulement à cause de la traite négrière. Sur la rue de l’Église se trouve ce qui fut l’École de médecine de l’AOF (Afrique occidentale française) – reconvertie en centre médico-social dépendant de l’Ordre de Malte -, la place du Cardinal Hyacinthe Thiandoum et l’Église St Charles Borromé.

Les autres sites sont : l’École Normale William Ponty où ont étudié plusieurs chefs d’État africains, l’une des plus anciennes mosquées du Sénégal, ainsi qu’une redoutable prison.

      10. Gorée et le souvenir de la traite des Noirs

Statue libération esclavage
La Statue de la Libération de l’Esclavage.                        NathyK ©

La Maison des Esclaves fut le dernier endroit auquel nous rendîmes hommage. Près de celle-ci se trouve un monument baptisé « la statue de la libération de l’esclavage », offert le 31 juillet 2002 par les frères guadeloupéens à leurs frères d’Afrique. À l’intérieur de la maison, nous visitâmes les salles de pesée, les cellules des hommes, des femmes, des enfants et des récalcitrants.

En effet, les individus étaient classés par catégories et la différence entre les hommes était déterminée par leur poids. Les moins de 60 kilogrammes étaient considérés comme invalides et devaient être nourris à base d’une farine enrichie au niébé (sorte de haricot très nutritif). Si à la date du départ, ils n’avaient pas atteint le poids requis, ils étaient vendus aux colons de l’île pour y servir en tant que domestiques.

Se nicher dans la petite cellule des récalcitrants, marcher vers la porte du non-retour ou voir les armes et autres objets de contention utilisés par les esclavagistes ne laisse aucun visiteur totalement indifférent. Sentir le vent impitoyable siffler, se faufiler entre les rocs des cellules lugubres et s’imaginer que les maîtres de l’époque vivaient confortablement au-dessus de ces lieux de torture donnent froid au dos. Malheureusement, plusieurs siècles après ce sinistre spectacle, on ne peut toujours pas affirmer que l’ère de la barbarie humaine est complètement révolue.

Nous n’eûmes pas le temps de visiter la Maison d’Éducation Mariama Ba, célèbre pour la qualité de son éducation, ni les différents musées, gardiens des vestiges du passé. Cela nous donnera plus d’une raison de retourner à Gorée, l’île aux mille cachettes.

~ °~

NathyK

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