9 mai 2013

De l’Art pour guérir

Arts plastiques
Materiel, Atelier d’Art-thérapie CHNU Fann                                  NathyK ©

Mercredi 08 mai 2013, il est 10 h 30. Une petite pause s’impose. Je fais un petit détour à l’atelier d’expression RESCAP’ART, du service psychiatrique du CHNU de Fann. Cette salle est située au rez-de-chaussée gauche de la Clinique Moussa Diop. Chaque fois que j’y entre, je m’évade instantanément.

La musique jazzy passe dans les airs. La dernière fois, j’ai eu droit à un morceau du célèbre chanteur camerounais Daouda. C’est gai. J’ai tout de suite envie de décompresser. D’ailleurs, j’y retrouve deux de mes collègues de division : l’un s’exerce au piano et l’autre contemple les tableaux. Je leur lance un regard complice. La relaxation est bien là.

Barry* et ses amis préparent du thé Ataya sur une mini-gazinière. Ça piaille, ça rit. L’ambiance est bon enfant. L’atmosphère est free, libre comme pour inspirer les artistes. Au centre de la pièce, Malik* se concentre pour finir son tableau. Il l’a commencé il y a trois semaines et aujourd’hui il s’attarde sur les finitions. Il peaufine. Comme je m’intéresse à lui, il accepte de se détacher quelques minutes de son œuvre pour satisfaire ma curiosité.

« Sur ce tableau, j’ai peint, deux bouquets de roses géantes, disproportionnées par rapport à la taille de l’homme qui est à côté. Cet homme est un chanteur. Il est seul. Son orchestre, ce sont ces fleurs. C’est pour symboliser la place importante de l’amour. Et en bas, les pétales qui tombent, signifie l’évolution dans le temps, qui laisse des traces, des fruits… »

Je voyage dans les pensées de Malik et j’essaie de comprendre ce qu’il veut me dire. Il sourit quand je lui demande ce que l’art-thérapie lui a apporté. Toujours disposé à répondre, il dit :

« L’art-thérapie m’a apporté de l’assurance. Je ne m’empresse plus. Ça me permet de rester concentré dans ce que je fais. Par exemple, si je change seulement la couleur sur cette partie du tableau, ça me forcera à modifier beaucoup d’autres détails. C’est pourquoi je dois rester calme quand je fais un mélange. L’art-thérapie me permet donc de canaliser mon énergie et de l’utiliser à la bonne dose. »

Je lui demande comment il est entré en contact avec ce groupe et il me répond :

« Je suis suivi à la consultation externe du service depuis plusieurs années. Comme j’ai étudié la technologie et que je faisais beaucoup de dessin sur papier à la maison, le médecin m’a proposé de visiter cet atelier. J’ai beaucoup aimé et je suis resté. Je dirige un cabinet d’audit et de contrôle de gestion, mais deux fois par semaine, je viens ici. Dès que commence, j’oublie tout, je me détends. »

Je remercie Malik et le laisse à ses gouaches. Au fond de la salle, le professeur d’art-thérapie, Mr Alassane m’invite à le rejoindre. Ça tombe bien parce que j’ai prévu de m’entretenir avec lui.

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L’appel est lancé.

Je quitte l’atelier, inspirée et revivifiée. Et il y a cette idée qui illumine mon esprit : « l’écriture à laquelle nous nous adonnons, tous les jours, c’est aussi de l’art-thérapie. Ça donne le courage à Fatouma de résister face à son Mali chamboulé, la force à  Mamady de subsister loin des siens et l’espoir au blogeur centro de vivre dans un Centrafrique pacifique. »

~°~

NathyK

* : les noms ont été changés pour préserver l’anonymat.

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